Accent achète la voix de travailleurs

17/02/2016 - 11h

Accent, une entreprise spécialisée dans les ressources humaines soi dit en passant, a réussi un beau coup de com’. La direction appelle ses travailleurs à ne pas participer aux élections sociales en échange d’un smartphone et d’un jour de congé. Une fois n’est pas coutume, je ne donnerai pas mon avis de juriste sur la légalité de l’opération. Je préfère mettre l’accent sur l’utilité d’une réelle représentation des travailleurs dans les organes consultatifs et sur ce que le dialogue social apporte de positif aux salariés et à l’entreprise. La proposition d’Accent démontre par l’absurde à quel point la concertation sociale est nécessaire.
 

Les élections sociales comme expression de la démocratie

En demandant de boycotter les élections sociales, Accent Jobs prive les salariés d’un droit démocratique fondamental sur le lieu de travail, avec pour prix du renoncement un jour de congé et un smartphone. Rien d’étonnant pour qui connaît cette entreprise. Accent use depuis longtemps de tous les moyens imaginables pour tenir les syndicats à distance et compliquer l'organisation des élections sociales. Elle a ainsi tenté de placer le jour du vote un samedi et, lors du dernier scrutin, elle a inscrit plus de 260 personnes sur la liste du personnel de direction, ce qui leur interdit de se présenter sur une liste et de voter. Bien sûr, il n’y a eu aucun candidat, pas d’installation du CE et du CPPT et par conséquent pas de démocratie. Accent Jobs ne vise pas que les syndicats, elle porte atteinte à la concertation sociale dans son ensemble. Et tout cela au moment où les négociations sectorielles entre représentants de travailleurs et des employeurs battent leur plein au sein de la commission paritaire à laquelle ressortit.
 

Et si les travailleurs vendaient leur droit de vote pour un téléphone portable ?

Imaginons un instant que tous les travailleurs préfèrent recevoir un smartphone à exercer leur droit démocratique d’être présents ou représentés dans la concertation sociale. Sans délégués, pas de négociation. Et alors ? Eh bien, l’employeur peut décider seul, par exemple des modalités d’usage dudit smartphone, mais aussi de toutes les autres conditions de travail comme les horaires, la répartition des jours de congé, etc. Pas moyen non plus de négocier sur le pouvoir d’achat. Que se passerait-il en cas de crise sociale ou de restructuration ? Comment mener à bien l’analyse des risques psychosociaux (burn-out) sans Conseil d’Entreprise, sans Comité pour la Prévention et la Protection au Travail ?
 

La concertation sociale constitue une plus-value pour l’entreprise

Proposer d’échanger le droit des travailleurs de défendre leurs intérêts collectifs contre de menus avantages revient à l’avilir. La concertation sociale constitue une plus-value tant pour les travailleurs que pour les entreprises, même celles qui ne connaissent aucun problème. Les organisations syndicales défendent les droits sociaux et la santé des travailleurs. Elles tentent d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés de sorte que leurs efforts soient justement rétribués. Même animé des meilleures intentions, un employeur peut prendre de mauvaises décisions ou négliger de s’attaquer à certains problèmes, trop occupé par ses affaires. La représentation syndicale qui fait remonter les informations de la base vers la direction est bénéfique à toutes les parties. J’espère donc que tous les travailleurs d’Accent exerceront leur droit de se porter candidat ou de voter pour leurs représentants pour les quatre années à venir. Tout le monde y gagnera.
 

Mario Coppens
Président national

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